En 1926, pour pallier le manque de
techniciens qualifiés dans les industries cinématographiques et photographiques,
Louis Lumière et Léon Gaumont créent une école technique professionnelle privée.
Placée sous la tutelle de l’éducation nationale après la seconde guerre
mondiale, l’école devient publique et se dote d’une section son. En 1964, elle
passe au rang de Brevet de Technicien Supérieur (BTS). Puis, au début des années
1990, face à la multiplication des BTS de photographie et en raison de la
qualité de l’enseignement qu’elle dispense, le diplôme supérieur est mis en
place (Bac + 5).
Les spécificités La section photographie
est alors divisée en deux options distinctes : prise de vue (PDV) et
traitement des images (TDI). L’âge (moins de vingt-sept ans) et le niveau
d’études (Bac +2) permettent de présenter le concours d’entrée spécifique à
chaque filière. Professeurs et professionnels composent le corps enseignant de
l’ENSLL (2) et assurent les cours organisés en modules techniques
et artistiques, théoriques et pratiques. Pour à acquérir
l’essentiel des connaissances générales, la première année est commune aux deux
options. Outre un réel intérêt pour la photographie, de solides connaissances
scientifiques sont nécessitées. En effet, les faibles coefficients dans les
matières scientifiques du concours PDV et la place importante qui leur est
octroyée dans les études peuvent dérouter certains. Ce fût mon cas. Néanmoins,
la maîtrise des méthodologies, qui assure une adaptabilité aux procédés actuels
et à venir, constitue un atout. Le rythme de travail soutenu et les notes
éliminatoires du contrôle continu exercent une pression (3), compensée par
l’opportunité de profiter d’équipements sophistiqués (4). Une source de
satisfaction à laquelle viennent s’ajouter des tarifs préférentiels sur du
matériel, un abonnement à la Maison Européenne de la Photographie (MEP) à un
prix privilégié, les projections du ciné-club et les soirées de l’école, l’accès
gratuit à certains cinémas… En PDV, les étudiants acquièrent une culture
dans tous les domaines liés à la réalisation et à la diffusion des images. Les
travaux pratiques se font sous forme de commandes passées par les enseignants
(5). Les TDI poursuivent les études techniques et scientifiques relatives au
traitement d'images argentiques et numériques.
Pour les deux options,
des modules d’anglais, de communication et d’économie, de droit et de gestion,
ainsi que des stages en entreprise obligatoires entre chaque année de formation,
complètent la formation. Des réalisations communes, comme la gazette Du sel
au Pixel qui restitue l’actualité des Rencontres d'Arles et du Mois de la
Photo à Paris (en partenariat avec la MEP), valorisent tous les aspects de
l’enseignement. Les étudiants intervenant selon leurs champs de compétences dans
toutes les étapes de sa conception et fabrication (ligne éditoriale, reportage,
portrait, tirage, rédaction, maquette, gestion de la couleur…)
(6).
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L’obtention du diplôme est en outre déterminée par l’élaboration
d’un mémoire de recherche et de sa soutenance devant un jury qui évalue la
capacité de l’étudiant à poser une problématique et à la résoudre.
L'insertion professionnelle Une enquête a été
menée sur les professions des anciens élèves et il semble que la polyvalence de
l’enseignement de l’ENSLL ouvre à toutes les carrières de la chaîne
photographique. Les affects de chacun jouant un rôle important dans le choix
d’orientation. Sur les quatre sections, les TDI entrent le plus rapidement
sur le marché du travail et semblent les mieux rémunérés. Ils occupent en
général des postes de technico-commerciaux (responsable de la gestion de la
couleur, chef de produit) dans les laboratoires, la presse ou les services
intégrés des fabricants et distributeurs de matériels ou de surfaces sensibles.
A quelques exceptions près, comme Eric Traoré, photographe de mode ou Samuel
Böllendorf, reporter, ceux qui se destinent au métier de photographe (salarié de
studio ou indépendant) connaissent des difficultés pendant une assez longue
période Pour autant, presque aucun n’abandonne vraiment la photographie. Enfin,
un certain nombre enseignent à l’ENSLL, tels Xavier de La Tullaye ou Bernard
Leblanc, mais aussi dans d’autres écoles. Une très forte motivation paraît
indispensable, d’autant plus dans un milieu bouleversé par l’arrivée du
numérique. L’association des anciens élèves de Vaugirard-Louis Lumière (AVELL)
(7), qui soutient l'insertion professionnelle des jeunes diplômés depuis sa
création, propose depuis 2004 un système de parrainage qui peut s’avérer
utile.
Aurore Deligny
 Je tiens à adresser mes
remerciements à Medhi AIT-KACIMI, responsable de la Communication et du
Développement de l’ENSLL et à Ludovic Dréan, auteur du mémoire de recherche
« La formation de l’ENSLL face au milieu de la photographie
professionnelle » (sous la direction de B. Leblanc et F. Denoyelle, ENSLL,
2003), d’avoir accepté de répondre à mes questions.
(1) Soixante-dix à quatre-vingt-dix personnes se
présentent en moyenne chaque année. Une dizaine est retenue pour chaque option.
Le concours est constitué de trois étapes : les tests (questionnaires à
choix multiples), les épreuves écrites, puis orales. Le site Internet de l’école
donne des précisions sur le programme des épreuves, les coefficients et les
critères de sélection du jury. Les annales représentent un excellent outil pour
se préparer. L’ENSLL propose par ailleurs des stages de
formation continue professionnelle généraux ou pointus. (2) L’équipe pédagogique est très étoffée : il
y a près d’un intervenant pour deux élèves. (3) En plus des contrôles de connaissances, de
nombreux rapports et travaux de recherche sont réalisés. Une moyenne inférieure
à 7/20 dans un module entraîne le renvoi de l’élève. (4) Les élèves disposent de deux plateaux de prise
de vue, de laboratoires noir et blanc et couleur, de laboratoires d’optique et
de sensitométrie, de salles d’informatique et multimédia. (5) Les thèmes (personnages, nature morte,
reportage, paysage, architecture), les procédés (argentique, numérique, procédés
alternatifs, techniques spéciales) et les supports (exposition, livre, cédérom)
sont variés. (6) Du sel au
Pixel sort sous forme de tirages et de journal A4. Grâce aux relations de certains enseignants, des industriels comme HP
ou Nikon apportent leur contribution en donnant des consommables ou prêtant du
matériel. (7) Présidée par Gilles
Flourens, l'AEVLL a pour vocation de favoriser le contact et d'aider les élèves
sortis de l'école. L’AVELL publie une revue trimestrielle et un annuaire tous
les dix-huit mois. |